vendredi 11 novembre 2011

Le temps des cerises (partie 2)

Déterminées a cueillir des cerises, Andréanne et moi sommes allées sur une autre ferme. Une ferme de Pakis. Avec le minimum comme accomodations pour les cherry pickers, c'est-à-dire 3 bécosses jamais nettoyées et aprovisionnées en papier de toilette pour environ 30-40 personnes, deux douches extérieures sans eau chaude, un réfrigerateur, un poêle, un lavabo extérieur avec l'eau qui coule en-dessous. Mon petit confort a pris une débarque là! Ce fut ma premiere vraie confrontation à la vie de cherry picker... Au début, j'essayais tout pour éviter d'aller dans les bécosses ou les douches froides. Je planifiait aller prendre un petit quelque chose au café du village (qui offrait une superbe toilette) pour y faire mon numéro 2 quotidien qui devenait de moins en moins quotidien, un détour vers Loose Bay pour y prendre une douche chaude... Soudainement, les douches a Loose Bay étaient devenues deluxe!Je me croyais en enfer... d'autant plus que c'était difficile de s'organiser à 3 personnes avec une van, étant 2 personnes à travailler à une place, et une personne à travailler ailleurs. Après 3 ou 4 jours, le fermier du départ, celui qui nous avait fait travailler dans son packing house, nous a finalement proposé de cueillir des cerises chez lui, en autant que nous sacrifions quelques journées à faire le trie des cerises au packing house. Après quelques réflexions, nous avons accepté l'offre, question de se rendre la vie meilleure et plus simple.

Pour ce qui est de la cueillette de cerises en tant que telle, lors de ma premiere journée c'était une véritable galère! D'autant plus que les arbres étaient particulierement gros et haut, ce jour là. Mon initiation à travailler avec une échelle à 3 pattes fut longue et pénible. Lors des premiers jours, je devais utiliser une échelle de 12 pieds, ce que je trouvais lourd à manipuler et particulièrement effrayant.  Au début, je cueillais plus de feuilles que de cerises. J'ai trouvé mes premières journées de cueillette pénibles. J'avais de la difficulté à manipuler mon échelle de 10 ou 12 pieds, de la placer adéquatement dans l'arbre pour atteindre les cerises, je m'épuisais a essayer de la sortir de l'arbre lorsqu'elle restait prise entre les branches (ca c'est vraiment choquant), je tentais de me contenir au bout de mon échelle et de cueillir à deux mains sans trembler... l'échelle c'est vraiment ma bête! Puis, je me suis mise à me fabriquer de la corne aux bout des doigts ainsi que des fissures. Mes doigts et mes ongles semblaient sales tout le temps, rien à y faire! J'ai ressenti mes premières crampes aux mains (jamais je n'ai autant travailler de mes mains) et mon haut de dos me faisait souffrir (un dos de cueilleur de fruit et un dos d'athlète c'est selon moi similaire...). J'ai aussi eu à me désensibiliser un peu avec les insectes (s'il n'y a pas trop d'insecticide dans un arbre, un cerisier c'est plein de perce-oreilles et d'araignées à grandes pattes)... mais il reste encore du travail à faire à ce niveau. Et il fait chaud! Néanmoins, le plus difficile selon moi, reste se lever à 4h du matin... ouch! Je ne suis vraiment pas une fille du matin. Ainsi ce fut long pour moi d'intégrer la routine, qui est idéalement se coucher à 20 h pour se lever minimalement du bon pied à 4h du mat.

Bref, cueillir des cerises c'est un dur travail, physiquement parlant. C'est du travail à la pièce, donc il faut garder un rythme constant et rapide pour faire de l'argent. À la fin, ça rend presque fou; on veut toujours PLUS, plus de cerises, plus d'argent!  Les cueilleurs efficaces et rapides peuvent faire beaucoup d'argent (entre 200 et 300$ par jour au Canada en moyenne). Pour ma part, j'étais loin de ce revenu. J'étais tout de même satisfaite, après un moment, du montant quotidien que je pouvais faire (+ ou - similaire au montant net que je faisais à ma vraie job), considérant que c'était ma première saison et que j'apprenais le métier. Je sais que je perd toujours beaucoup de temps à analyser où placer mon échelle et à vérifier 2 ou 3 fois plutôt qu'une que celle-ci est bien stable avant d'y grimper. Néanmoins, je me planifie un an de voyage et il n'est pas question de gâcher celà ou de me casser le cou pour quelques cerises...

Même s'il faut travailler dur pour gagner son argent en cueillant des cerises, j'ai trouver cela particulièrement zen. Être dans le haut d'un arbre en train de cueillir des petits fruits rouges et voir le soleil se lever... il y a quelque chose de magique là!  Et les sources de stress dans ce travail sont plutôt minimes! Cela peut aussi paraître facile, considérant qu'habituellement vers 11 heures, la journée de tavail est terminée et qu'il reste toute la journée à profiter.

Après Oliver, nous nous sommes dirigés à Creston, une autre petite ville en Colombie-Britannique où la saison des cerises est plus tardive. Selon moi, Creston est beaucoup plus charmante qu'Oliver. Même si encore là, il n'y a pas grand chose à y faire (la seule activité culturelle est,  je crois, la visite de la brasserie Kokanee), il y a des endroits splendides où passer le temps et le village est situé au creux d'une vallée avec la chaîne de montagnes des Kootenays à proximité. Toutefois, notre campement n'avait rien de charmant... c'était totalement dégueulasse du début à la fin.... Durant les 3 semaines, la seule douche avec de l'eau chaude ne fut jamais équipée d'une lumière et il n'y avait pas de fenêtre. Ainsi c'est dans le noir et le nez dans le moisi (peut-être était-il préférable de ne rien voir) que nous tentions de nous faire une hygiène corporelle... Et les toilettes! C'était littéralement la merde! Toujours bouchées et pleines... uuuuhhhh!  Je préférais faire ce que j'avais à faire dans les bécosses qui étaient plus nettes et salubres... c'est pour dire.

C'est à la fin de notre séjour à Creston que nous avons découvert les fabuleuses piscines publiques, paticulièrement celles en centre communautaire... De ce que j'ai vu, les piscines en Colombie-Britannique n'ont rien à voir avec celles du Québec... elles sont pleines d'agréments! La piscine au centre communautaire de Creston est équipée: de 3 bassins avec une eau tempérée selon le bassin, il y a un sauna ainsi qu'un spa entouré d'une baie vitrée avec vue sur les montagnes, il y a un parcours avec un courant d'eau dans lequel il est possible de se laisser flotter ou de faire fonctionner ses muscles en tentant d'y marcher à contre-sens, il y a une cascade d'eau, il y a un mur d'escalade, ainsi que les trucs habituels de piscines tels corridors de natation, plongeons, panier de basket-ball, etc. On s'y est amusés comme des enfants! Et ce qui était merveilleux, c'était de se laver dans une douche saine et propre après la baignade!  À la fin, alors que nous étions complètement écoeurés des conditions insalubres qu'offrait notre campement, c'est en s'offrant quelques visites à la piscine que nous avons pu éviter le désagrément des douches, au moins à quelques reprises. Il faut dire que selon les ouïe-dires, nous avions le pire campement de cherry pickers à Creston. J'en ai conclut que les cherry pickers ont la vie dure et que leurs conditions sont parfois minables...

Après 5 semaines à cueillir des cerises, mon corps n'a eu guère le choix de s'endurcir. Mon confort aussi... Une fois habituée au travail, je ne peux pas dire que j'ai trouvé cela désagréable. Je n'en ferai pas une carrière certes. Néanmoins, les heures de travail passent plutôt bien et c'est de l'argent rapidement gagnée. J'ai même pris plaisir à le faire à la fin, particulièrement lorsque les arbres sont bien taillés et que les branchent débordent de cerises. Heureusement, puisque le plan est de cueillir des cerises durant environ 3 mois en Australie pour voyager davantage par la suite... J'ai même décidé de refaire la saison au Canada l'été prochain, juste avant le retour au Québec...